Une démotion

Et quelques centaines de milliers plus tard 🔻

Hiver 2022. YUL 🛫 DEN

Classe affaire—payé l’extra de ma poche.

Why not! Dix mois plus tôt, on vendait notre SaaS.

FFWD à mon siège A1, direction Colorado, bureaux de l’acheteur.

Je m’en vais pitcher la vision pour Duda eComm—notre nouveau produit.

Encore high de notre sortie, je débarque de l’avion torse bombé :

M’a leur montrer que le CEO de Snipcart, c’est pas un deux de pique.

Comme de fait, je ace ma présentation. Je les fais rire, les Américains woke pis les Israéliens secs.

Une semaine plus tard, on m’offrait une promotion : VP PMM!

Un mois plus tard, je fumais des clopes back-à-back, burned out à Tel-Aviv.

Un an plus tard, je perdais le Nord et quelques centaines de milliers de dollars.

Aujourd’hui, je te raconte l’histoire au complet.

J’ai raconté cet échec live aux Fuckup Nights Québec durant le Rendez-vous numérique 2025. Merci respectivement à 2 Degrés & Capitale numérique pour l’opportunité et l’organisation. On l’a filmé, donc ça sort bientôt. Un bon show. Abonne-toi sur notre YouTube pour pas le manquer.

Retour aux sources

Je sors de l’aéroport, saute dans mon Lyft.

À travers la vitre, des montagnes familières à l’horizon.

Ces mêmes montagnes m’entouraient en 2014, pendant mon tech baptême de feu.

Un quart de sourire m’apparaît dans la face. Je me rappelle quand je me pratiquais à prononcer “DE-VE-LO-PER” en anglais avec mon pote Lucas. L’élan de mon sourire coupe sec quand je repense à ma colonne fracturée sur une trampoline, la même année. Frissons.

Je détourne le regard des montagnes.

Drôle de feeling, revenir ici presque dix ans plus tard.

Y’a maintenant une virgule dans mon compte en banque que je ne pensais jamais voir. Surréel.

La naïveté et les dettes du stagiaire ont disparu, mais pas ses insécurités.

Bon. Assez de rêveries. On arrive aux bureaux Louisville de Duda. Ça ne se lancera pas tout seul, ce nouveau produit-là.

Time to shine…

Contrairement à mes pitches de n00b de l’époque, celui-ci frappe fort.

Ça applaudit, ça sourit. La femme du CEO, une VP, m’annonce avec un beau sourire "qu'ils voudront me reparler bientôt."

Quelques jours après mon retour à Québec, le CEO, m'appelle. Il m'offre le rôle de VP Product Marketing—une case libre depuis un bout dans l'organigramme.

Peu avant l’annonce de ma promo, il me demande de prendre le département de contenu aussi. La directrice se pousse, besoin de patcher temporairement.

Excité, j’en parle à quelques proches. Un exec de SF me dit d’embarquer sans hésiter sur ce train vers l’IPO. Hausse de salaire, plus de stock options, beaux défis…

YOLO?

J’y crois, moi, en notre nouveau produit et en cette compagnie-là. J’y crois, moi, à l’histoire de Frank VP d’une cie cotée en bourse.

Je canalise mon inner Leeroy Jenkins pis je me lance tête première.

Mais y'avait une raison pourquoi elle était libre, cette case de VP PMM.

Bâtons dans les roues de mon tricycle

Okay, LinkedIn mis à jour.

Autant fier que stressé. Me gave de contenu sur le PMM, l'embauche, Duda.

Je dis à TOUT le monde que j'ai eu une promotion comme VP. Parce qu'à ce moment-là, faut absolument que le monde sache que même après la vente, Frank continue de gagner.

La Head of Content me fait une passation de pouvoir avec un regard débordant de doutes. M'envoie une tonne de docs.

Oh well, so long! I got this.

Du contenu, j'en mange au petit déjeuner, ma pote.

Je rencontre ma nouvelle équipe contenu, éparpillée aux USA.

La première personne à qui je parle… démissionne on the spot :

Rien de personnel, j'hésitais à partir et cette énième réorg m'a convaincue.

Cool. T’avais l’air smath, mais je vais engager, pas de trouble.

Je rencontre l'équipe PMM (presque inexistante).

J'ouvre des réquisitions pour embaucher, me synchronise avec les RH :

Au fait, telle personne est un poids mort—gère ça avec délicatesse.

Huh… toujours le fun essayer de sacrer quelqu’un dehors que tu connais pas encore.

Je connecte avec les autres VP : marketing, produit, ventes. Chacun me déverse un paquet d'attentes non-résolues envers les anciens leaders PMM.

Mon calendrier se transforme en sapin de Noël trop décoré.

Je commence à entendre parler de plus en plus du BOARD.

BTW, je fais allusion à mon tricycle parce que j’ai aucune idée comment être un exec dans une compagnie distribuée globalement. Comme pour la majorité des défis professionnels dans ma vie, j’ai suivi ma recette signature 👇

Verser 1/2 tasse de Dunning-Kruger par-dessus 1/3 de tasse de syndrome d’imposteur, ajouter un soupçon d’ego, brasser un peu, cul-sec.

Brûlé

Deuxième voyage en Israël. 60-65h/semaine. Été 2022.

On est loin de la lune de miel du premier trip.

J’enchaînes les cigarettes, parano avec les tensions géopolitiques (des incidents se sont produits juste avant/après mes séjours).

Une VP hijack mon huitième break boucane. Elle me challenge parce que j'ai parlé d'une décision stratégique à un de ses subordonnés sans passer par elle. Elle me dit de promettre que je ne referai plus ça. Je ris et lui dis qu'on n'a pas besoin de voir les choses de la même manière.

Couple d’heures passent. Pas fier de moi.

Vers 23h à Tel Aviv, un de nos plus vieux devs de Snip m'appelle—il démissionne.

Trop de meetings, trop de red tape, trop de comms avec les autres équipes.

Je pogne un deux minutes. Ma conception de “notre startup” se fissure.

De retour à Québec, un problème d'accessibilité pète publiquement sur les forums Duda.

Une suite-C :

C'est ta job asteur. Règle-ça. Dis-moi pas pourquoi c'est pas ta job, j'ai pas le temps.

Triggered. Jamais aimé ça me faire dire quoi faire. Encore moins en mode Israeli military.

M'a tous les régler vos problèmes PMM, mais pas TOUT SEUL avec mon équipe de ZÉRO PERSONNES.

Je convertis deux employés de Québec à PMM sur un coin de table. Un peu de répit. Je cours pour embaucher.

Le bureau d'Israël veut des Israéliens. Le bureau du Colorado veut des Coloradans. Casse-tête de timezones pour se parler.

Chaque fois que j'ai un coup de coeur sur une candidate, les autres VP me coupe le gazon sous le talon :

  • Pas ce qu'il faut.

  • Trop junior.

  • Manque 1-2 compétences.

  • Test pas impressionnant.

Mais au final c'est TA décision, tu fais ce que TU veux.

Sure, ouais.

Pendant ce temps-là, j'interview du monde d'un calibre que j'ai jamais eu en marketing chez nous. J'ai juste ça, des idées de comment les intégrer dans mon équipe. Mais même le CEO me dit d'être plus sévère sur les critères d'embauche.

Je suis non-stop en entrevue et appels avec les recruteurs.

Je commence à piger que c'est pas la même game d’embauche pantoute que dans notre petite startup bootstrapped.

Tensions

Pour plusieurs projets concrets, au moment où j'arrive sur le bord de la mettre dans le net, je me fais casser par une suite-C en meeting final. On recommence. Me sens comme Tom Cruise dans Edge of Tomorrow.

Je ne suis pas habitué de me faire dire “not good enough—again.” L’adversité, ça n’a jamais été ma tasse de thé. Je l’ai souvent esquivée.

Mes efforts de sales enablement dérapent complètement. Tout le monde s'en sacre de mes slides pis de mon Notion. Les vendeurs veulent pas vendre le nouveau produit (plus tard j'ai compris pourquoi).

OH, this just in: les marchés crash, on coupe 13% du staff. Je dois laisser partir des gens que j’aime, ou que je venais à peine d’embaucher.

Mon calendrier ressemble à Rainbow Road dans Mario Kart. Pareille piste anxiogène, avoue!

Georges essaie de m’aider :

Plus tu réponds à des courriels, plus t'en reçois. Faut que tu leur présentes une vision et un plan stratégique, que tu pognes leur buy-in, pis qu'après tu les forces à respecter ce cadre-là.

Okay, Giorgio, mais je ne vois plus clair, et quand je réponds pas aux courriels en 48h, ils me ping sur Slack. Quand je réserve du temps pour du travail stratégique long-terme, je me fais double-booker par un exec qui doit "absolument" me parler. Souvent, c'est pour me rajouter des TODOs.

Mais je peux pas lâcher...

Qu'est-ce que le monde chez Duda vont penser de moi? Ma team de Snip? MES CONNECTIONS LINKEDIN?

Les autres, les autres, les autres...

Throw some D’s

Démotion

Un nouveau CMO rentre. Ben crinqué, ben demandant, ben plein d'initiatives. Encore plus de meetings, plus de rapports hebdo/mensuels. Le beef pogne entre certains execs.

Je me plains aux cofounders—deux gars qui venaient de changer ma vie et de m’accorder une tonne de confiance. Je déplore : red tape, game de politique d'influence, incentives mal alignés, attentes irréalistes. Je leur dis que j'ai jamais travaillé autant pour ma propre compagnie, et que j'ai pas besoin de plus d'argent.

Je m'écoute chialer, pis je m'aime pas.

Vous voulez être brusques, tout challenger, et me couper la parole? Checkez-moi ben aller.

Je deviens raide sur Slack. J'arrête de répondre à certaines personnes. Je deviens passif-agressif dans certains calls. Des fois cynique.

C**ss, j'aime pas cette version-là de moi. L'ado frustré de se faire dire quoi faire. L'enfant qui veut se sauver quand y'a peur de perdre.

Je dérape dans un yo-yo décisionnel. Montagnes russes mensuelles pour ma mère et ma blonde. Je m'en vais ou pas? Le cash... l'ego...

J’ai demandé à ma blonde comment elle décrirait cette période-là. Pour la citer : Tu faisais ce qui t'irrite le plus chez les autres. Tu te plaignais, tu hésitais, mais tu restais dans ta bouette et tu ne faisais rien pour en sortir. Je l’écris ici pour m’en rappeler.

Brûlé. 0 énergie. Je travaille comme un chien. Et pourquoi? Ce n’est plus ma compagnie, j'ai assez de cash pour aider ma Mom anyway.

J'appelle les co-founders et je demande une démotion.

Ça goûte mauvais dans ma bouche durant tout l’appel. Encore plus après.

Le soulagement éclipse juste pas la honte. Les vieilles boucles roulent :

Tu te pensais bon, mais tu l’es pas. T’as pris une trop grosse bouchée, petit poisson. T’as encore déçu du monde qui croyaient en toi.

Je leur dis que je vais rester pour ne pas bousiller la motivation du staff à Québec et pour finir mon earnout. Mais molo.

Démission

Me voilà Product Manager ou quelque chose du genre. Je rapporte à deux niveaux par-dessus moi—un moyen manager et le nouveau suite-C qui a de la misère à faire sa place dans encore une nouvelle réorg.

Mon équipe fonctionne quand même bien. Le produit marche.

Mais ça ne me tente même plus d'aller au bureau. Je joue à Warzone plus que je travaille. À la moindre affaire qu'on me demande, je soupire.

Je me dis que je pourrais avoir un employé qui fait ça. Que je ne suis plus rendu là dans ma carrière. Que je suis écoeuré du ecommerce. Que je veux faire autre chose. Que j'ai jamais pris de décisions pour l'argent.

Et y’a ce jeu de mots niaiseux qui me trotte dans la tête depuis quelques mois :

Ça se passe... SaaS se passe... SaaSpasse?

Début février 2023, je donne ma démission.

Mars 2023, je lance SaaSpasse.

J'ai perdu quelques centaines de milliers de dollars, mais j'ai gagné la meilleure job de ma vie.

Et je n’ai plus rien ni personne à blâmer quand ça va mal—c'est moi le patron.

Ça me force à prendre mes responsabilités et des décisions.

Les leçons du Pope

J’ai beaucoup appris chez Duda :

Le timing des communications. Le dosage de transparence. L'imputabilité du staff. L’importance de la vente interne, de l’influence.

Le genre de trucs dont je riais dans ma phase punk-rock startup. Que je disais que je ferais jamais.

Mais j’aurais pu en apprendre tellement plus sur :

  • L’opérationnalisation des ventes

  • Le leadership exécutif et la gestion d’un CA

  • La vélocité d'embauche et de décisions

  • L'acquisition d'une autre compagnie

  • Le GTM global

En vrai, j’ai foiré mon cadrage.

Au lieu de :

Je suis ici pour prouver aux autres que je peux être VP d'une plus grosse compagnie et pour faire plaisir à ma mom/mon planif financier en allant chercher tous les earnouts.

J'aurais dû recadrer ce chapitre :

Je suis ici pour devenir un meilleur leader et apprendre une tonne. Ça va booster ma carrière d'entrepreneur ensuite.

Au moins, j'ai (ré)appris sur moi-même: si ça ne me tente pas de faire quelque chose, je le ferai juste pas. Je dois être motivé au fond pour le faire. Sinon je tombe dans des mauvais plis.

Y'a un niveau de complexité et d'ambition dans lequel je ne suis pas un bon joueur. Ou simplement pas un joueur heureux. J'admire ça, mais je veux pas ça.

Ça me fait plaisir d'être un moyen gros poisson dans un petit étang. Rien à foutre d'être le plus gros requin dans le plus gros océan.

La NBA c'est cool, mais brasser des filets sur le terrain local avec du monde du quartier aussi. Ça veut pas dire que tu peux pas jouer au basket si tu veux pas faire la NBA.

Les meilleurs entrepreneurs sont ceux qui se connaissent profondément, le bon et le mauvais, et qui harnessent ça de façon authentique. Ils construisent autour de ça.

Ils jouent leur propre game.

J’ose espérer que c’est ce que je suis en train de faire aujourd’hui.

Quelque chose à ajouter? Good. Laisse un commentaire ou réponds à ce courriel direct.

Cheers,

Frank 💜

SaaSpasse à Québec

On vient faire un tour à Québec le 24 avril!

Ça se passe chez Folks RH et y’a juste 50 billets alors si tu veux venir — c’est maintenant ou jamais.

J’enregistre un pod live avec Jimmy Plante, CEO @ Folks.

Au menu :
• La première année et demie comme CEO repreneur de Jimmy
• l’acquisition d’une nouvelle entreprise et son intégration (Glow Talents)
• les défis & motivations d’un rebranding

Les pros du robot 🤖

Ma vieille tronche dans le vidéo de Baseline

Baseline m’ont demandé de parler de pourquoi on les a choisi et j’ai fait la cut dans le montage final.

Pour entendre les raisons qui m'ont fait tomber en amour avec cette gang d'experts AI, regarde ça :

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Voici le dernier épisode du pod :

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Okay bobye!

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